Société Ville le 8 Novembre 2012
Adresse
tél: xxxxxxxxxxxxxxxxxxx
mél: xxxxxxxxxxxxxxxxxx
SIRET: xxxxxxxxxxxxxxx
Monsieur le Sénateur XXXXXXX
Sénat
Palais du Luxembourg 15 rue de Vaugirard
75291 - Paris cedex 06
Monsieur
le Sénateur,
Je me permets, en ma double
qualité d'opticien diplômé et de citoyen français, d'attirer
votre attention sur un projet de loi dangereux pour notre système de
santé.
Dans un but, à priori
louable, de permettre au plus grand nombre de nos concitoyens
d'accéder à un niveau de soins optimal, tout en maîtrisant les
dépenses de la CPAM mais surtout des OCAM, notre gouvernement semble
s'orienter vers des solutions dont les effets néfastes sur
l'économie du pays risquent d'être notables.
Pour ma part, je me
cantonnerai à mon niveau de compétence et de connaissances, à
savoir l'optique-lunetterie bien que ce projet de loi mette en cause
de multiples médicaux et paramédicaux de proximité.
Monsieur le Président de la
République François Hollande et Madame la Ministre des Affaires
Sociales et de la Santé Marisol Touraine ont clairement exprimé ces
derniers jours leur désir de faire évoluer les réglementations et
lois dans un sens désiré par les OCAM.
A savoir :
-permettre le développement
de réseaux fermés d'opticiens et autres professionnels de santé
liés à ces mêmes organismes,
-permettre le remboursement
différencié selon que l'adhérent s'orientera dans ou hors de ces
réseaux, actions actuellement contraires aux réglementations du
Code de la Mutualité.
Bien que de nombreuses
questions puissent se poser quant aux conséquences sur l'évolution
de notre société que cela sous-entend, notamment la perte de la
liberté de choix de son fournisseur et autres considérations, j'en
resterai, dans ce courrier, aux points d'aspects purement pratiques
et qui relèvent de votre compétence en tant qu'élu de la
République, législateur et représentant de nos concitoyens.
Selon une étude GFK, le
marché de l'optique en 2011 représentait 5,703 milliards d'euros,
la TVA ainsi générée s'élevait donc à 934 millions d'euros.
L'un des buts en apparence
bénéfique de ce projet est de faire baisser le prix moyen des
produits fournis d'une façon conséquente, cela générerait
mécaniquement une baisse équivalente des recettes fiscales, une
telle perte de TVA est-elle une perspective acceptable dans un marché
assez stagnant?
D'autre part, l'équilibre
financier de nombreux magasins d'optique s'en trouverait compromis,
et de nombreuses fermetures de points de vente mis en faillite en
seraient l'aboutissement.
Si on a constaté par le passé
un développement, peut-être abusif, du nombre de magasins par
l'acceptation d'une formation de diplômés surnuméraires, le tissu
national de la présence de nos boutiques qui en résulte représente
l'un des moteurs de la vie locale, même de petites villes sont
aujourd'hui dotées d'une offre concurrentielle appréciée des
habitants. Le commerce de proximité, tant apprécié de l'ensemble
de la population, est, dans notre domaine, une réalité
incontestable.
Il génère également des
revenus non négligeables à l'économie locale, particulièrement
dans les petites villes, qui risqueraient fort de pâtir de son
démantèlement et participe au maintient de l'activité dans des
zones géographiques parfois peu favorisées.
De plus, dans les régions
moins desservies en offre cela obligerait les gens à faire plusieurs
dizaines de kilomètres pour se rendre chez l'opticien sélectionné
arbitrairement, alors qu'ils en ont un plus proche, non agrée.
Cela entraînerait aussi le
non-choix de son opticien, par affinité, par confiance ou pour son
professionnalisme. Les appels d'offre périodiques de ces réseaux,
risquant de générer une modification régulière de la liste des
opticiens y participant, nuiraient gravement au suivi des
bénéficiaires qui souhaitent conserver un professionnel de santé
régulier. Ce qui se passe actuellement dans les réseaux des
complémentaires privées en est l'exemple même. On peut même
craindre à terme que ces réseaux se trouvent constitués des seuls
centres mutualistes, détruisant ainsi toute notions de concurrence
et de choix.
Des études sérieuses
montrent que la libre concurrence actuellement en place a permis
depuis plus de dix années, qu'à qualité équivalente, les prix de
nos fournitures ont baissé. Le panier moyen est resté stable avec
une offre qualitative en constante amélioration, gardons confiance
en cette capacité régulatrice.
Concernant l'avenir de
l'organisation de notre métier, il me semble clair que deux projets
opposés peuvent se distinguer.
L'un, peut-être trop libéral
pour certains, permet la liberté de choix, offre des remboursements
de frais définis par la mise en place d'un tarif de référence,
viable et indexé, comprenant une offre acceptable en terme de
qualité. Il laisse le client libre de choisir un équipement plus
qualitatif s'il le souhaite en en assumant la différence
tarifaire.La plupart des opticiens proposent déjà des offres
forfaitaires à tarif modéré répondant parfaitement aux besoins
des plus modestes et appliquent les directives concernant les
bénéficiaires de la CMU.
Cette solution permettrait à
notre profession de préserver son dynamisme actuel dans la qualité
et l'innovation.
L'autre, même se présentant
sous couvert d'apparences généreuses mais purement oligarchiques,
est l'encadrement drastique de notre activité. Cela implique
irrémédiablement un lissage vers le bas des équipements, à
l'instar des pratiques anglo-saxonnes, et la maîtrise des coûts par
une optimisation du temps attribué à chaque client. Ce temps est
bien l'un des principaux facteurs qui génèrent actuellement les
tarifs divers liés à notre activité.
Je penche naturellement vers
la première solution, qui, d'un point de vue purement économique ne
peut être que la plus réaliste. En effet, elle permettrait de
conserver non seulement le tissu économique et de proximité de
notre profession, mais aussi notre savoir, notre dynamisme et notre
innovation, ce qui nous a permis, par exemple, de passer des verres
double-foyers aux verres progressifs de dernière génération et à
notre pays d'être industriellement leader au niveau mondial.
Je vous prie donc, Monsieur
le Sénateur, d'intervenir auprès de vos collègues afin que
l'ensemble des paramètres soient pris en compte dans leurs décisions
à venir. Que la vision partisane et intéressée de certaines
instances ne mette pas en péril une profession et un système qui,
bien que naturellement perfectible, donnent actuellement satisfaction
aux besoins et souhaits réels de la population française, comme le
montre l'ensemble des enquêtes réalisées ces dernières années.
Je vous invite également,
Monsieur le
Sénateur, à venir me rencontrer dans mon magasin et son atelier
afin que vous puissiez juger par vous-même de l'aspect très
technique et très professionnel de notre métier, trop souvent
assimilé à la seule vente de lunettes.
Dans l'espoir que ma requête
retienne votre attention,
Je vous prie d'accepter, Monsieur le Sénateur, l'expression de mes respectueuses salutations.
SIGNATURE